Après le retour de la ville sous l’autorité royale, le chapitre de Saint-Pierre passa commande d’un grand tableau d’autel au peintre Sébastien Bourdon (1616-1671), protestant converti, issu d’une famille d’artisans de Montpellier. Peintre renommé, membre de l’Académie royale de peinture, Bourdon prit pour thème – à moins qu’il lui ait été imposé – un épisode des Actes des Apôtres (VIII, 9-24) rarement illustré par les peintres : la chute de Simon le magicien. Fameux parmi les Samaritains pour ses sortilèges, Simon, comme beaucoup d’entre eux, s’était fait baptiser. Lors de la venue de l’apôtre Pierre en Samarie, il voulut recevoir l’Esprit Saint en échange d’argent dans l’espoir de pouvoir, lui aussi, faire des miracles. Pierre refusa et le maudit pour avoir voulu acheter « le don gratuit de Dieu ». Le Concile de Trente avait condamné sévèrement le commerce des valeurs spirituelles et à Montpellier, au lendemain des violences religieuses, le thème choisi par Bourdon symbolisait clairement la victoire de la papauté sur l’hérésie, mais aussi la condamnation des pratiques qui l’avaient suscitée. Dans une composition novatrice et très virtuose, qui ordonne la scène en strates de plus en plus larges, Bourdon s’est représenté lui-même parmi une trentaine de témoins de la punition de Simon, qui, sous les yeux de l’empereur Néron, échoue à s’élever au ciel, comme l’avait fait Jésus. Malgré le scandale qu’il provoqua, le tableau demeura longtemps au-dessus du maître-autel, jusqu’à ce que la transformation du chœur impose son déplacement. C’est dans le transept droit qu’on peut aujourd’hui l’admirer, privé malheureusement de son spectaculaire cadre doré.
Sébastien Bourdon (1616–1671), peintre montpelliérain
1658 Huile sur toile 6,50 x 4,70 m